La Réunion, île de La Rencontre

Un moi et demi sur l'Île aux Parfums. Il est temps d'aller voir un peu ce qui se passe de l'autre côté de Mada.

L'occasion d'une formation amène mes petits pas sur les sentiers de lîle de La Réunion. Et comme elle porte bien son nom !

Initialement partie pour quatre jours de rando dans les cirques en solitaire, et pour un appel au réseau scout pour dormir de-ci de-là, rien ne s'est passé comme prévu. Et quel bonheur !!

   

Arrivée à Roland Garros (Aéroport de St Denis), après un petit moment de flou, deux amis de mon amoureux viennent me chercher pour m'héberger pour ma première soirée sur l'île. A peine entrée dans l'appart, des personnes partout, de la joie de vivre, de la rencontre. Car pour moi c'est ça cette île. L'île de La Rencontre. Ni une ni deux, après présentations, retrouvailles avec certains déjà croisés à Paris, et découverte d'amis en commun (le monde est vraiment trop petit !), l'un d'entre eux se pose, prend un Djembe, et lance un rythme. Ils m'expliquent que ce rythme est le rythme de base du Maloya, musique traditionnelle de La Réunion. Et en moins de deux, nous voilà tous, un Djembé, un saladier, une guitare ou un maracasse dans les mains à goûter à notre musique. Et oui, Nous voilà tous. Pour ceux qui me connaissent un peu, la musique est pleine de pudeur pour moi. Et pourtant... Une première soirée incroyable qui lance en moi l'envie folle de croquer cette île à pleines dents.

Le lendemain, et les matins qui suivirent, le réveil fut matinal. entre les départs pour la fac ou pour les ballades, la journée commence tôt. Mais se réveiller aux premières lueurs avec trois mines souriantes (je ne vous l'ai pas dit, j'ai débarqué dans un studio chez un ami qui était déjà occupé par deux autres garçons ! Un peu sérré !), la musique qui nous fait voyager et un vrai petit déjeuner préparé par Dam à partager, difficile de faire réveil plus doux.

Des papiers administratifs à faire dans la journée, dirrection la fac des sciences de Saint Denis. Redécouvrir un campus, les étudiants qui révisent ou râlent pour telle ou telle raison, tout le monde qui se connaît et se dit bonjour, et surtout, avoir l'impression de découvrir un monde dans lequel certains ont déambulé il y a quelques années, une seule envie : rentrer en cours ! Surtout que je vivais avec deux Master 1 en Biologie Marine... La journée s'écoule au gré des rencontrer, des rires, des sourires, d'un peu de slackline et de beaucoup de partage. 

Le soir nous voilà de nouveau à frapper, pincer, secouer, pour faire naître des rythmes et des mélodies sans se soucier de ce qu'on est en train de faire, juste en vivant la musique et surtout, en la ressentant en nous, liés par elle. Puis un petit tour au Chat Blanc. C'est vrai, quitte à découvrir la vie ici, autant aller faire un petit tour dans un bar sympa. J'y retrouve des têtes connues (à 10 000 km de Paris...), et y découvre bien sûr des nouvelles. Le bar ferme, c'est l'occasion d'aller voir un peu ce qui se passe chez un copain qui habite pas loin. Sur son petit balcon, nous voilà tous à parler de tout, de rien, de nous, des autres, mais rapidement, les instrus reprennent le dessus. Le Djembe à 2 h du matin n'a pas eu l'air de plaire aux voisins. Ni les rires forts et vrai de cette bande de joyeux lurons. Mais qu'à cela ne tienne, même si je peux les comprendre, c'était tellement bel...

   

C'est Mercredi ! Jour de marché au Chaudron ! Après les explications de mon guide Flo, me voilà seule à me balader dans Saint Denis avec mon sac sur mon dos, mon sourire qui ne s'est pas ténu une seconde depuis trois jours, et mon coeur tellement plein qu'il pourrait jaillir hors de moi sous le soleil de plomb. Habituée au marché couvert de Mamoudzou, découvrir l'ampleur de celui-ci et toutes ses couleursm'égare un moment. Je vogue entre les étales face à toutes ces choses que je ne connais pas. Le Chouchou ? Le Ti'jacques ? Le Tamarin ? Des fruits et légumes connus aussi, des ananas (dont je n'hésite pas à me saisir de trois ou quatre représentants), des mangues, des passions, des bananes, des légumes de partout, des plantes, et même des perroquets ! Chaque achat est l'occasion de découvrir la culture, la vie ici, et l'échange d'une barquette de tamarin contre une piecette m'apporte un quart d'heure d'explications sur la construction de la nouvelle route du littoral. Tout est surprise et voyage, et ce "premier oeil" que je pose sur ce marché grouillant me fascine.

Tout est surprise, en effet, car après avoir trouvé le piment cabri que je tenais absolument à envoyer en Métropole, me voilà face à une tenture qui représente une forme qui ressemble fort à un pays que je connais un peu... le Bénin ! Un béninois était bien là sur le marché à ventre de l'artisanat du pays. Quelle joie ! plus un sous en poche a par une ou deux pieces de 2 € qui trainent, nous voilà partis à parler du Bénin, de Paris, de Mayotte, de La Réunion, et de la beauté des amours longs-courrier (il semble que nous ayons tous deux des attaches dans le grand ouest). Peu à peu au cours de la discussion, les légumes se rangent, les parassols se ferment, le marché disparait comme il a sans doute apparu avant les premiers rayons du soleil. Il est temps de nous quitter et de reprendre chacun sa route. Un coup d'oeil sur ses bracelets me fait flancher mais mes poches sont vides. Ce beau moment partagé est tout de même digne de concerver une trace, il m'offre un petit bracelet de cuivre, une promesse qui rejoint à mon bras droit mon anneau du Bénin.

Fin d'après-midi, un sursaut de motivation nous envoie Dam, Harold et moi à la poursuite du coucher de soleil. Nous atterissons à la Saline, où nous passons un délicieux moment à refaire le monde, à s'écouter vraiment, et à profiter de la beauté du ciel qui tombe dans la mer. Moment de quiétude que vient pimenter l'arrivée d'un petit pote, un grand toutou qui nous adopte pour la soirée. Dernières lueurs du jour, la lune grimpe dans le ciel et le froid commence à nous saisir, il est temps de rentrer retrouver Flo.

Jeudi ! Aujourd'hui je me lance !! Je vais bien finir par voir ce qui se cache là-haut, derrière les falaises et les flancs verdoyants de ces montagnes ! Alors c'est parti, quatre bus et 3h plus tard, je me retrouve seule à mi-chemin entre la côte et le col du Maïdo, sous une chaleur et un soleil cuisant. Un peu inquiet, le chauffeur me demande trois fois si je descend bien ici, s'il ne me ramène pas à St Denis, mais à ma mine réjouie et au ton de ma voix, il finit par me laisser là, tout sourire, en me souhaitant bonne chance. Le col est encore loin, et la journée bien entamée, alors je décide de faire du stop. Encore faudrait-il que des voitures passent. 5 minutes, 10 minutes, et une voiture s'arrête ! Un couple de Suisses en vacances qui montent justement au col. Au cours de la montée (que nous mettons à profit pour refaire entièrement le système éducatif français), le paysage change. Nous entrons dans une forêt composée d'arbres aux feuilles rases et aux troncs épais, dont les méandres donnent une sensation de mystère et de magie au lieu. Nous montons, nous montons, les arbres laissent place aux arbustes et à la flore robuste et rachitique, avec oh surprise, des ajoncs partout dont le jaune des fleurs tranche avec le noir de la roche volcanique sur laquelle ils prennent racine. Avec le changement de végétation intervient notre entrée dans la brume.

Un rideau de nimbes au début, qui s'épaissi peu à peu pour devenir un dense brouillard. En haut, nous nous quittons, et je me met en quête du départ des sentiers. Mais au bout de 5 minutes, je me demande quand même si vagabonder seule dans un blanc total dans une montagne que je ne connais pas est une si bonne idée. Par hasard comme sorti du volcan, je tombe sur une petite buvette associative. Le gérant manque de sursauter lorsque j'arrive, tout sourire, avec un tonitruant "bonjour". Vu le temps, il ne pensait voir personne aujourd'hui, et m'explique malheureusement que j'aurai beau aller dans n'importe quelle direction, je ne risque de ne voir rien d'autre que le blanc. Déçue, je reste un moment avec lui. Il me fait goûter sur café vanille, ses gâteaux, son rhum arrangé, et très vite, seuls au monde perdu dans les nuages, nous parlons de nous, de son histoire, de la mienne. Mélange de joie, de rires et d'émotions qui me mettent au bord des larmes, je serais bien restée ici encore longtemps avec ce curieux bonhomme qui semble me connaître si bien. Mais des ouvriers arrivent pour une livraison pour l'hélicoptère, qui acceptent de me redescendre après leur déchargement.

Alors en les attendant, je commence à rebrousser chemin. Seule seule seule entre les ajoncs, la mousse et le roc, me voilà chantant, virevoltant, dansant et riant à gorge déployée. Je suis tellement heureuse, tellement libre, et j'ai cette sensation que tout change en moi mais que ne m'effraie pas. Je perds de l'altitude, et je découvre le panorama.

La baie de St Paul en bas se révèle entre les nuées de vapeur, et le bleu profond de la mer a presque une beauté violente après ces quelques heures passées dans le coton. Mes deux pilotes sont Malgaches ! Ils me racontent alors leur vie là bas, leur vie ici, leur famille, leurs enfants, la mer, les voyages, tout ça sur fond de musique traditionnelles Malgache, devant la vue magnifique de la baie sous le soleil. Avec un ou deux détours pour me montrer les plus beaux points de vue, il me déposent à la gare de St Paul.

   

 

Le temps de prendre un glace (au GOYAVIER) et de lire quelque pages sur la plage puis sous un arbre, je prend le chemin du retour. Encore de jolies rencontres dans le car jaune, les retrouvailles avec la pluie de St Denis qui permet aux enfants de courir dans les flaques d'eau, avant de regagner le cocon d'Harold, Florian et Damien, des clochettes plein les yeux.

Toutes ces rencontres m'amènent à vendredi... sans doute le premier jour d'un autre chapitre de ma vie...